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près du cimetière des éléphants
 
les hommes se foutent d’être des hommes
ils regardent germer les poteaux
sur le bord des routes
et ça fait des blés électriques
sans aucune herbe folle
ils regardent les vagues déferler dans leur verre
et la glace ne rafraîchit plus
il reste le goût fort de l’amer dans leur bouche
même les pieds de chaise
ne les supportent plus
trop lourds de leurs bennes
pleines
de soupirs satisfaits
les hommes se foutent d’être des hommes
et le héraut à la tête penchée
grave l’écho de son fardeau
au frontispice du cloaque
où pourrissent dans le formol
des mots de farandole
 
il pleut sur le marigot
et le grand singe fantastique
ne saute plus
il feu dans le caniveau
et le petit bateau cosmique
ne tangue plus
il fait sommeil au bord du corps
en désaccord
et la tortue bleue acéphale
à tête d’algues arc-en-ciel
ne marche plus
au son du fifre
et des crécelles
sur les pointillés des ronds d’eau
à l’ombre du grand feuillage blanc
près du cimetière des éléphants

 

Eric Pitton 
le 23/06/2010

Au jardin des fêtes galantes

 

Sous la treille j’ai vu
Un bossu tout de pierre
Aux faux airs de penseur
Méditer sur le temps

Un vieux portail en fer
Au fond d’un mur d’antan
Arbore une serrure
Où passent tous les vents

File l’eau file
Doucement file l’eau
Glisse l’eau lisse glisse

Une fuie sans une aile
Sous la branche d’un chêne
Joue les vieilles antiques
Et s’oublie en silence

Et le banc vert-de-gris
Que Watteau a dû peindre
Garde le souvenir
Des amours qui ne meurent

File l’eau file
Doucement file l’eau
Glisse l’eau lisse glisse

 

Eric Pitton

en pensant à verlaine … et watteau

Ils disent que

 

ils disent que tu grandis mal

avec tes cahiers sales

qui trainent des pieds

ta démarche bancale

aux pages écornées

les livres du savoir t’enfuient

ça sent trop lourd

tous ces mots gris

ils disent que tu vas mal finir

à te gratter le fond des poches

que tes demains

sont déjà moches

ils disent que tu te fous de tout

t’as pas de rire et pas d’ami

que la galère

t’attend au bout

alors t’as tatoué ton bras

de mots qu’ont du sens que pour toi

 

ils disent que

 

 

eric pitton

Le 02 juin 2010

La balançoire

 

Les orbites évidées

De mes rêves passés

Ont les bras pantelants

Des rendez-vous amers

La potence me prend

Par le cou

Et la trappe qui s’ouvre

Et l’attrape qui souffre

Ô corde qui peau tance !

Tout m’appelle à l’odeur des blés jeunes Pour conjurer la nuque

De la mortelle issue

Un entre-deux du monde

Parcelle de seconde

Pour la fugace image

D’un sous-bois de fougères

D’un pré à l’herbe épaisse

D’une confiture chaude

D’une histoire au couchant

D’une main qui vous tient

Et vous mène au galop

Petits pas

Des bougies qui se soufflent

De cet air qui abonde

En ce monde

Et qui se raréfie

Aujourd’hui

Et la branche noueuse

Où pend la balançoire

Balancements de rires

D’un gamin fou de joie

C’est à vous que je pense

En oraison dernière

Mon ciel est sous mes pieds

Car la corde n’est plus

Celle de cet autrefois

Tout qui se précipite

Dans un ultime vite

Je me balance encore

Dans la poussière des morts

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